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>Énergie & Climat>Performance climatique des projets

Mesurer l’impact carbone des projets liés à l’énergie (notamment pour l’accès à l’énergie)

Évaluation1.5/3

L’Accord de Paris a pour objectif phare dans son article 4 d’atteindre la neutralité carbone à l’échelle mondiale d’ici 2050. Bien que l’accord n’entre pas dans les débats sur le mix énergétique nécessaire à la transition, ce secteur devra être fortement décarboné pour que les émissions résiduelles puissent être compensées par les puits de carbone.

Au travers de la Stratégie nationale bas carbone, les engagements de la France sont clairs : les émissions de gaz à effet de serre du secteur de l’énergie doivent tendre vers 0 pour que le pays dans son ensemble puisse atteindre la neutralité carbone. Cet enseignement est applicable quel que soit le pays considéré et la décarbonation du secteur de l’énergie devra être une priorité dans l’ensemble des politiques énergétiques. Il est ainsi essentiel de mesurer l’impact carbone des structures de production et de transport de l’énergie, tant au niveau domestique que dans le montage de projets de développement.

L’AFD s’est engagée dans le cadre de sa stratégie transition énergétique à rechercher des impacts positifs pour ses projets sur le plan environnemental ; localement à travers la maîtrise des impacts environnementaux, la réduction des pollutions locales, et globalement par la diminution des émissions de gaz à effet de serre. Notamment, l’AFD s’est donnée pour objectif de financer plus de 50 % de projets avec un co-bénéfice climat (objectif atteint en 2019, avec 77 %).

A l’AFD, des critères existent sur la prise en compte de l’empreinte carbone des projets financés et des méthodologies pour la réalisation de bilan carbone ont aussi été développées par thématique. Une note méthodologique définissant des critères d’éligibilité est d’ores et déjà disponible sur les projets de transport et distribution d’électricité. L’objectif est de montrer que le secteur est engagé dans une trajectoire de décarbonation crédible.

Cependant, seuls les projets de substitution sont pour l’instant concernés, leur impact étant plus facile à calculer. Si un travail est apparemment en cours à l’AFD dans le cadre de sa redevabilité carbone, aucune méthodologie n’existe actuellement pour les projets d’accès à l’électricitér. Si un travail est apparemment en cours à l’AFD dans le cadre de sa redevabilité carbone, aucune méthodologie n’existe actuellement pour les projets d’accès à l’électricité off-grid. 

Pour le moment, des critères existent uniquement pour qualifier la part de co-bénéfices climat dans des projets d’accès à l’énergie, sans parler de bilan carbone complet. Ces critères sont inspirés des principes communs et se basent sur la part d’ENR prévues sur le réseau en 2030. Les projets d’accès à l’énergie, y compris off-grid, s’ils ont des impacts sociaux et économiques positifs, provoquent une augmentation de la consommation et d’équipements, ayant des impacts climatiques non-nuls, qui doivent être mesurés et maîtrisés.

Ainsi, si des outils existent déjà et si divers sujets sont globalement « balisés » en terme de bilan carbone, de nombreux projets ne sont pas en capacité de mesurer leur impact carbone. C’est le cas des projets d’accès à l’énergie hors réseau pour lesquels ni les émissions directes (production d’énergie), ni les émissions indirectes (équipements des ménages, effet rebond par exemple) ne sont comparées à une situation de référence. Coordination SUD déplore donc un manque de connaissances et d’outils sur le sujet.

Bien qu’une méthodologie claire et lisible devrait être élaborée en 2021 par le groupe AFD (méthodologie à suivre), l’AFD a pour l’instant concentré ses efforts sur les projets représentant une part importante de ces financements : les projets raccordés aux réseaux nationaux.

A noter que très peu d’études décrivent les impacts carbone de l’accès à l’énergie off-grid et prennent en compte les situations de base et les analyses du cycle de vie des matériels de production renouvelable.

Retours terrains

Les développeurs de projets n’étant pas en mesure de calculer les impacts carbone de leur projet (manque de moyens, de méthodologie adaptée à l’off-grid, d’obligations, etc.), ce critère n’entre pas en ligne de compte dans les décisions. Quelques retours terrain :

  • Les décisions de développement de projet, comme le choix de la technologie de production d’énergie par exemple, sont prises en fonction de critères économiques (viabilité) ou techniques (omniprésence du solaire en Afrique de l’Ouest par exemple) et non en lien avec les émissions de carbone associées (ce qui nécessiterait dans le cas du solaire une analyse de cycle de vie complète des matériels de production photovoltaïques et de stockage). Si les énergies renouvelables s’imposent de manière naturelle grâce aux gisements, à la technologie et à la maturité industrielle liée à la baisse des coûts, ce changement de paradigme comporte un risque : celui que l’Afrique devienne un territoire d’expérimentations des départements de R&D des acteurs des énergies renouvelables (et notamment ceux du stockage), sans considération pour une problématique environnementale majeure : le recyclage des équipements, au premier chef celui des batteries.
  • C’est également le cas pour la part du thermique dans la production d’une centrale hybride alimentant un mini-réseau, par exemple. Dans ce cas de figure, seules les émissions liées à l’utilisation du groupe électrogène sont habituellement estimées et comptabilisées, par incapacité à mesurer celles de la technologie associée (solaire + stockage par exemple).
  • L’installation d’un mini-réseau dans une commune provoque souvent une augmentation de la consommation (relative selon les régions) et du taux d’équipement en appareils électriques en tout genre (télévisions, réfrigérateurs, ventilateurs, équipements productifs, etc.). Ces équipements sont la plupart du temps achetés sur les marchés locaux à bas prix, sont inefficaces énergétiquement et ont une durée de vie limitée (liée à une qualité médiocre ou une mauvaise utilisation). S’il est indéniable que ces équipements améliorent la qualité de vie des utilisateurs, leur fabrication, utilisation et la non-gestion de leur fin de vie ont un impact carbone certain qui doit être pris en compte comme retombée du développement de l’accès à l’énergie.

Si des progrès sont à noter dans la prise en compte du carbone et des impacts climat dans la construction des projets d’énergie, une généralisation des dispositifs créés est attendue, notamment sur l’électricité off-grid. Les quelques recommandations suivantes sont donc proposées :

  • Se doter d’une méthodologie détaillée de calculs des émissions des projets, notamment pour les projets d’accès à l’électricité off-grid, prenant en compte la situation de référence, des analyses de cycle de vie, les émissions directes et indirectes (concrétisation), avec un accent sur les émissions absolues des projets.
  • Intégrer un rapport impacts (sociaux, économiques) / impact carbone comme critère de sélection des projets financés (ajouté à l’analyse coût/bénéfices), notamment sur l’off-grid (mais pour cela se doter en amont d’outils permettant aux porteurs et porteuses de projets de calculer/mesurer cet impact carbone).
  • Renforcer les exigences de mesure de la contribution à l’atténuation aux changements climatiques dans le calcul des co-bénéfices climat des projets. Coordination SUD propose également d’augmenter cet objectif du pourcentage de projets financés à co-bénéfice climat de 50 % à 75 % (ambition) – un résultat de 77 % ayant rapidement été atteint.

Pistes évoquées dans l’atelier de capitalisation sur les spécificités de l’accès à l’énergie (Coordination SUD, novembre 2020)28 : Développer des méthodes de calcul pour les projets, notamment d’accès à l’énergie, pourrait faciliter l’accès à la Finance carbone. La Finance carbone aurait le double avantage d’octroyer des financements complémentaires et de pousser à un suivi/monitoring précis. Les organisations bailleurs pourraient ainsi promouvoir et permettre l’accès à une Finance carbone vertueuse afin de soutenir des projets par ailleurs difficiles à financer via des modes de financements classiques. Attention,  car la manière dont sont considérés les impacts sur le climat (uniquement basés sur les émissions de CO2) amène le risque de négliger des projets présentant d’autres co-bénéfices liés aux objectifs de développement durable. Il est nécessaire de développer d’autres outils et mode de calcul pour valoriser l’impact des projets et leur cohérence avec l’Accord de Paris.

28. https://tinyurl.com/3vtzad8j